vendredi 1 janvier 2010

Êtes-vous calé en altimétrie ?

Vous est-il déjà arrivé de vous sentir un peu bas en vent-arrière ? Avez-vous déjà eu la surprise une fois posé de retrouver votre altimètre en dessous de zéro ?


Et en IFR, à qui n’est il jamais arrivé de voir rentrer le glide bien trop tôt sur un ILS et de ne pas comprendre tout de suite pourquoi ? Le point commun entre toutes ces petites mésaventures : un mauvais calage altimétrique.
Pourquoi y a-t il différents calages et comment passer de l’un à l’autre
sans se tromper ?
Les réponses à ces questions vont vous servir aussi bien pour passer l’examen théorique que pour voler en sécurité comme par exemple vérifier si le FL65 est suffisant pour passer au dessus d’une antenne à l’altitude de 5800 ft avec une marge de 500 ft.


Commençons par le QFE.

Pour lui, c’est très simple : mettez-le à la benne !
Il ira rejoindre ses copines au cimetière des fausses bonnes idées.


Définition : pression atmosphérique régnant sur l’aérodrome au niveau du sol. Un altimètre calé au QFE indique une hauteur par rapport à l’aérodrome.

La seule utilité du QFE est de permettre à l’altimètre d’indiquer une hauteur par rapport à l’aérodrome. Quel intérêt à part la satisfaction de voir l’altimètre à zéro une fois posé… la belle affaire ! Cela n’apporte en vérité qu’une charge de travail supplémentaire ainsi qu’une source d’erreurs au moment du départ et surtout de l’arrivée. Ce sont pourtant deux phases pendant lesquelles le pilote devrait avoir du temps pour faire des choses bien plus importantes, comme gérer sa vitesse, sa trajectoire et regarder dehors,
le tout alors que souvent la fatigue se fait sentir. La disparition du QFE est d’autant plus irréversible qu’un dernier obstacle est en train d’être levé : les cartes VAC. En effet elles étaient les dernières cartes officielles à faire référence à une hauteur AAL (Above Airfield Level – Au dessus du niveau de l’aérodrome). Dorénavant quand il n’est pas à 1000 ft AAL (donc QFE), le circuit publié possède une double indication : son altitude en italique et sa hauteur AAL entre parenthèse (voir fig.1).


Fig.1 : extrait d’une carte VAC
avec double indication pour le circuit de piste
(source SIA)

Vous remarquerez sûrement que le calcul ne tombe pratiquement jamais juste. C’est exprès ! Prenons l’exemple d’un terrain situé à 570 ft avec un circuit à 800 ft AAL. Si vous convertissez en altitude, vous obtenez un circuit à 1370 ft. Pourtant la carte VAC vous indiquera 1400 ft. C’est tout simplement par souci de simplification. La FFA a insisté à l’époque pour que le SIA n’indique pas l’altitude au pied près, mais
l’altitude arrondie à la centaine la plus proche aussi bien au dessus qu’en dessous (il n’y a pas de marge de franchissement d’obstacle en circuit VFR). Ainsi pour une altitude de 1249 ft, il sera retenu 1200 ft alors que pour 1251 ft, ce sera 1300 ft.
Et pour 1250 ft pile-poil me direz-vous ?... Je vous laisse deviner de quel coté va le bon sens et la sécurité.


Passons au QNH.

Vous pouvez l’utiliser partout, quelle que soit la phase du vol dés lors que vous êtes près du sol.


Définition : pression atmosphérique ramenée par calcul au niveau de la mer selon les caractéristiques de l’atmosphères standard. Un altimètre calé au QNH indique une altitude.

Les RDA (arr. du 3 mars 2006) vous imposent de voler en niveau de vol (donc calé au standard) à et au dessus du niveau le plus bas utilisable tandis qu’elles imposent de voler en altitude (donc en QNH) au dessous (cf. annexe 1, § 3.1.3).
La raison en est simple : plus un avion est près du sol, plus son pilote a intérêt à savoir rapidement
à quelle hauteur il est. C’est très facile par simple comparaison de son altitude indiquée par rapport à l’altitude topographique (voir fig.2) autour de lui (il y a des erreurs instrumentales et des corrections par rapport à l’atmosphère standard, mais ce n’est pas l’objet de cet article).



Fig. 2 : indications d’altitudes topographiques
sur la carte OACI au 1/500 000
(source IGN / SIA)


Finissons par le calage standard.

S’il vole suffisamment haut, la préoccupation principale du pilote sera de s’étager par rapport aux autres trafics, le sol étant loin. Dans ce cas, on utilise les niveaux de vol et le calage standard.


Définition : calage correspondant à la pression moyenne au niveau de la mer en atmosphère standard soit 1013,2 hPa. Un altimètre calé au standard indique un niveau de vol.


Le calage standard est finalement le plus utilisé par le plus de pilotes et pendant le plus longtemps.
C’est en effet lui qui sert de référence aux avions IFR pendant leur croisière.
Pourtant en VFR, beaucoup de
pilotes se contentent de voler en dessous de 3000 ft QNH et rares sont ceux qui ont utilisé le calage standard. Les niveaux de vol apportent pourtant une plus grande sécurité et un confort de vol accru.



Validez votre altimètre.

Le but est de vérifier qu’il fonctionne correctement. Cette vérification est possible dés lors que vous connaissez déjà le QNH (terrain contrôlé, AFIS ou par consultation des infos météo – STAP, METAR ou ATIS).


Tant que vous êtes au sol, affichez le QNH dans la fenêtre de Kollsman de votre altimètre. S’il fonctionne correctement il doit vous indiquer l’altitude topographique de l’endroit où vous êtes sur l’aérodrome. Reportez-vous à la carte VAC et attention aux aérodromes ayant des dénivelés importants. Si votre instrument indique un écart maximum de ± 60 ft, il est bon pour le service (cf. OACI Doc 8168).
Sur un terrain sans service d’info, vous n’avec pas le choix ne connaissant pas le QNH : faites l’inverse. Affichez l’altitude topographique puis notez le QNH dans la fenêtre de Kollsman.
Mais vous ne pourrez pas valider l’altimètre. La plupart de ces terrains étant exclusivement VFR, cela ne pose pas de souci de sécurité.
Il y a encore beaucoup d’instructeurs et d’écoles privées qui enseignent une autre procédure, plus ancienne : elle
consiste à afficher l’altitude topographique la plus exacte possible et à noter alors l’écart de calage en hPa. Le pilote annonce alors tel altimètre à « +1 hPa », à « -2 hPa », etc. en fonction de l’écart de pression relevé. Le problème, c’est que le risque d’erreur est très important pour un gain en sécurité quasi nul étant donné les écarts courants de tenue d’altitude en pilotage manuel. Par exemple si l’altimètre est dit « +2 hPa» mais qu’en vol le pilote se trompe et le corrige à -2 hPa (simple erreur de signe), l’écart sera lors de 4 hPa, soit environ 120 ft alors que le pilote pense son altimètre corrigé et juste !
En y réfléchissant à tête reposée, il est bien plus sage d’accepter un écart d’altitude indiquée (tant qu’il reste dans les tolérances indiquées plus haut et d’autant plus qu’il sera « noyé » dans l’imprécision de pilotage) que de risquer de se retrouver avec un écart doublé sans en être conscient.



Changez de calage sans vous tromper.

Les pilotes VFR ne sont pas assez sensibilisés à l’attention qu’ils doivent accorder à ce changement de calage.


Leur formation les amène à modifier le calage altimétrique sans vérifier la cohérence de la nouvelle altitude indiquée par rapport à la précédente. C’est dommage car cette vérification est pourtant facile et rapide à faire. Et c’est même une technique toute simple qui
permettra aux élèves-pilotes de ne plus se tromper en passant le théorique PPL !
Il existe en fait deux techniques de vérification : la mauvaise… et la bonne. En plus clair et dans l’ordre : la « méthode des falaises » et la « méthode des deux altimètres ».



La méthode des falaises : la mauvaise.

Et c’est bien dommage car c’est la plus intuitive.



Fig. 3 : méthode des falaises
(dessin de l’auteur)

On représente les surfaces isobariques standard (1013 hPa) et QNH (voir fig.3). Connaissant l’écart entre les deux pressions, on en déduit facilement l’écart d’altitude indiquée. Pourtant sous cette apparence de facilité se cache une incohérence : l’esprit humain cherche à mettre en haut le chiffre le plus élevé. Or puisque nous parlons de pression, cela doit être l’inverse : la pression diminuant quand l’altitude augmente, les pressions les plus fortes sont dessous.
D’où un nombre important d’erreurs quand la charge de travail est forte (arrivée ou mise en descente) ou le stress important (test théorique par exemple).
Le deuxième problème de cette méthode vient du fait qu’on ne peut pas se passer d’un schéma. Or en vol, il est le plus souvent impossible, et en tous cas très inconfortable, de se mettre à dessiner sur un bout de log de nav deux falaises, des chiffres, des calculs… Bref la galère. Oubliez !



La méthode des deux altimètres : la bonne.

Dans cette méthode, vous imaginez disposer de deux altimètres dans votre avion. L’un est réglé au QNH et l’autre au standard (rappelez-vous, on a jeté le QFE à la poubelle).


Là aussi, on connaît l’écart entre les deux pressions, donc la différence d’altitude indiquée (Zi).
Maintenant comment savoir ce qu’indique chaque altimètre ?...
C’est là qu’en réalité ça devient facile. Retenez bien la règle suivante, c’est la clé de voûte de
cette méthode : plus le calage est élevé, plus l'altitude indiquée est élevée (voir fig.4). Tout simplement ! Mais ne me croyez pas sur parole, essayez et vous verrez à quel point c’est facile, rapide et avec bien moins de risques d’erreurs.



Fig.4 : méthode des deux altimètres
(dessin de l’auteur)

Mais pourquoi vérifier au fond ?

Deux erreurs de manipulation provoquent le plus souvent les erreurs d’altimétrie : l’oubli pur et simple et l’erreur de calage.


Cette dernière est fréquente quand la fenêtre de Kollsman est trop petite et que la pression à afficher est proche d’un multiple de 5. Ainsi pour afficher 1023 hPa, le pilote aligne le 2e trait après 1025. Mais
s’il lit trop vite les repères 1030 et 1020, il peut aisément afficher 1027 hPa au lieu de 1023 (voir fig.5). 4 hPa d’erreur, c’est 120 ft d’écart. Largement suffisant pour croiser un autre trafic de très près.



Fig.5 : possibilité d’erreur de calage
(dessin de l’auteur)

Quant à l’oubli, cela va du pilote qui marche encore au QFE, qui oublie de repasser au QNH au départ et qui pénètre un espace aérien au dessus de lui pour cette raison à celui qui intègre la vent-arrière 350 ft trop bas parce qu’il a oublié de repasser au QFE (quand je vous
dis qu’il faut le laisser tomber celui-là). En IFR, cela peut être plus grave : c’est le cas du pilote qui fait toute sa procédure en étant resté au calage standard (que ceux qui n’ont jamais commis l’erreur jettent la première pierre).



En conclusion.

L’altimètre est probablement l’instrument de pilotage le plus indispensable au pilote.


Beaucoup sentent la vitesse de leur avion sans lire le badin et certains savent s’orienter sans aide d’un compas. Mais aucun n’est capable de dire s’il est à 1500 ft ou bien à 1250 ft du sol.
L’altimétrie commence par un
calage correct de son instrument et par l’acquisition d’un réflexe salutaire : vérifier la cohérence de l’altitude indiquée. Une fois ce réflexe acquis, vous constaterez que c’est comme le reste du pilotage : ça ne s’oublie plus.

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